Technologies intellectuelles

En faisant des recherches sur l’intelligence artificielle, je suis tombé, par sérendipité, sur l’expression “technologies intellectuelles”, reprise par Nicholas Carr dans un récent article. Nicholas Carr indique que l’expression a été utilisée par le sociologue Daniel Bell pour désigner les outils que nous avons inventés pour augmenter nos capacités mentales. Parmi ces technologies viennent à l’esprit la lecture et son corollaire l’écriture, mais aussi le calcul. Des démarches comportementales visant à augmenter l’efficacité personnelle comme les techniques d’organisation, de communication  ou d’interaction dans des groupes en sont, à mon avis, d’autres exemples.

Sans entrer dans la distinction entre technologie et technique, on conçoit que ces pratiques doivent être apprises, peuvent devenir comme une “seconde nature”, mais ne sont pas instinctives. Elles ne sont pas inscrites naturellement dans notre développement cognitif, comme le langage. Nous ne sommes pas conçus génétiquement pour lire, compter, gérer le temps ou interagir de manière optimale dans des groupes.

Pourtant, si l’on prend l’exemple de l’écriture et de la lecture, on est fasciné par le fait que ces apprentissages deviennent si intimement liés à nous que nous les pratiquons comme naturellement.

Des technologies visant à augmenter l’efficacité comportementale, et pas seulement intellectuelle, ne pourraient-elles pas être aussi utilement enseignées, comme faisant partie de l’ABC de l’être humain en devenir, au même titre que la lecture et le calcul ?

Je pense qu’elles devraient faire partie de l’enseignement de base proposé à tous. L’étude d’ouvrages comme “Getting things done” (David Allen), The Evolution of cooperation (Robert Axelrod) ou How to win friends and influence people (Dale Carnegie) , seraient à mon avis au moins aussi profitable aux jeunes en formation que l’étude des racines carrées ou de la triangularisation des matrices…

Coopération (3) : passion et contention des passions, Charybde et Scylla

Charybde et Scylla par Alessandro Allori La stratégie “donnant-donnant” brille par sa régularité et sa prévisibilité. Ces deux caractéristiques renforcent la confiance mutuelle entre les partenaires. Elles font aussi que, dans un réseau, toutes les relations ne se valent pas. Des relations nourries sur le long terme par des actes coopératifs répétés valent potentiellement plus que des relations nouvelles. C’est une leçon que les serial networkers des réseaux sociaux comme LinkedIn et Viadeo feraient bien de méditer. A quoi sert d’avoir des centaines de connexions dans son réseau si rien ne se passe après les avoir ajoutées ? Un tel réseau social se comporte comme un cerveau dans lequel aucun influx nerveux ne circulerait entre les neurones.

Régularité et prévisibilité sont donc, si l’on peut dire, les deux mamelles de la stratégie “donnant – donnant”. Elles peuvent être sérieusement contrecarrées par nos passions, réactions impulsives et chaotiques.

Qui d’entre nous n’a jamais répondu de manière brusque à un e-mail mal compris parce qu’il était de mauvaise humeur à ce moment-là pour une raison complètement étrangère à l’émetteur du message ?

Ce genre de comportement crée des malentendus qui sont autant de fausses notes dans la coopération.

Sur le long terme, cependant, le fait, pour des partenaires, d’être capables de surmonter ces soubresauts, renforce la confiance. Après tout, nous ne sommes qu’humains.
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