L’intelligence collective est un concept de plus en plus utilisé dans les médias, par les entreprises et même par les hommes politiques, désormais. On ne peut que se réjouir de sa nouvelle popularité. Ceci dit, encore faut-il savoir ce que l’on met derrière les mots. Gare à ceux et celles qui l’utiliseraient en incantation, comme la clé de résolution de tous les problèmes. Pour notre part, nous préférons une approche plus modeste qui consiste à s’intéresser à ses manifestations. C’est pourquoi nous focalisons notre étude et notre pratique sur la coopération et les jeux entre des acteurs, tous phénomènes observables, eux.
Ceci dit, cela n’empêche pas de s’interroger sur l’intelligence collective. Mais pour pouvoir définir ce que c’est, il faudrait d’abord savoir s’entendre sur ce qu’est l’intelligence.
Or, ce n’est pas simple. La définition attribuée à Alfred Binet : “l’intelligence, c’est ce que mesure mon test” (d’intelligence), montre bien la difficulté qu’il y a à définir la nature de l’intelligence. La définition de Richard Atkinson est l’une de celles qui nous plaît le mieux : “l’intelligence est la capacité à découvrir un contexte nouveau, à le comprendre et à réagir à cette nouvelle situation de façon adaptée.” Elle associe en effet la compréhension (qui est de l’ordre du savoir) et l’action (ou la réaction), deux composantes qui nous paraissent intimement liées dans l’intelligence.
Par ailleurs, doit-on parler d’une intelligence ou de plusieurs ? Si certains chercheurs mettent en avant une capacité générale, une corrélation entre les différentes capacités d’un individu sous la forme d’une contante, g, pouvant être mesurée par des tests, d’autres, à l’instar d’Howard Gardner, préfèrent mettre l’accent sur différentes formes d’intelligences (linguistique, logique, visuelle, etc.)
Enfin, les perspectives technologies laissent entrevoir une autre intelligence : celle des machines.
Peut-on réellement désigner sous le même vocable :
On notera au passage que l’émotionnel joue certainement un rôle dans l’intelligence, puisqu’on sait maintenant qu’un individu qui serait privé d’émotions (par exemple à la suite d’une lésion cérébrale), ne pourrait plus prendre des décisions efficaces.
Toutes ces zones de flou conceptuel sur l’intelligence rejaillissent nécessairement sur la notion d’intelligence collective. C’est pourquoi nous apprécions la définition nuancée qu’en donne Jean Michel Penalva : “L’intelligence collective est une hypothèse relative à la capacité d’un groupe d’agents cognitifs (dans le cas général, ces agents peuvent être de nature humaine, animale ou artificielle) à atteindre dans l’action une performance d’un niveau supérieur”. Elle englobe bien les différents agents susceptibles d’intervenir dans la production d’une intelligence collective, associe intelligence et performance et souligne…qu’il s’agit d’une hypothèse.
Peut-on dire que l’intelligence collective n’existe pas ? Certainement pas. Est-ce suffisant pour dire que c’est une science ? Si l’on s’en réfère au fameux critère de falsifiabilité de Popper, rien n’est moins sûr.
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